Sonia Devillers, l'instant D.

Une rencontre avec Sonia Devillers, animée par Sophie Gindensperger (Télérama) le samedi 10 février. De L’Instant M au carrefour de la Matinale d’Inter. Faire de l’impertinence une marque de la fabrique, tout autant qu’un scanner de l’actualité, à laquelle Sonia Devillers convie des invité·es du 7 heures 50.

« Longtemps, je n’ai pas aimé les gens qui parlent à la radio. Il a fallu que moi-même je cause dans le poste pour apprendre à y écouter les autres.

La radio est affaire de culture familiale, de transmission. À la maison, on n’écoutait pas la radio. Mon père, seulement, France Musique dans la voiture et toujours beaucoup trop fort. C’était pénible. Avec ma soeur, on se barricadait. On ferraillait contre ces sonates hurlantes qui couvraient nos voix. Encore aujourd’hui, lorsqu’il faut choisir entre une conversation et la radio, je coupe la radio. La superposition, pour ne pas dire la bataille que se livrent ces deux champs sonores, m’est insupportable. Soit on parle, soit on écoute. Jusqu’au bout, donc, j’écouterai la radio seule.

Comme papa, je l’écoute dans la voiture (mais sans les enfants à l’arrière !), comme lui, je l’écoute très fort. J’ai fait mes premiers pas à la radio sans une once de culture radiophonique. J’étais journaliste de presse écrite. En arrivant à France Inter, je ne savais pas qui étaient Daniel Mermet, Jean-Luc Hees, Kathleen Evin, Nicolas Demorand, Pascale Clark, Stéphane Paoli… jamais entendu parler. Au sens propre comme au sens figuré.
J’opinais du chef, je faisais semblant, je n’osais même pas poser de questions. Ridicule de la situation. J’ai découvert la radio en en faisant. Appris dans un même élan à énoncer et à écouter. J’ai posé mes mots en scrutant les leurs. Ils me médusaient, ces cadors du micro. Leurs voix crevaient les ondes comme on dit d’un acteur qu’il crève l’écran. Pas une question vocale, pourtant. On ne regarde pas un acteur « être », on le regarde « faire ». Pareil pour ces grandes voix, je ne les écoutais pas parler, je les écoutais faire. Et ils étaient d’excellents faiseurs. »
― Sonia Devillers

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Photos © Sébastien Durand

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